La réunion de parents d'élèves.

Publié le par ecoleauvitriol.over-blog.com

Ouais, on dit « de parents d’élèves ». Parce que les parents d’enfants, on s’en cale, apparemment.

 

Ces réunions, c’est comme faire un tour de la société en trois petites heures. Eprouvant.

 

Vous avez les parents plus cons que les gamins. Quand vous leur expliquez les lacunes de leur gamin, vous voyez très clairement dans leurs regards effarés que ce n’est pas eux qui vont pouvoir réparer le problème.  Ceux-là, après trois minutes de monologue, vous savez qu’il est parfaitement inutile de poursuivre l’entretien. Va falloir compter sur le gosse seul. Et c’est pas gagné.

 

Vous avez le parent « il est en échec, mais il est brillant au fond ». Bien entendu. Ses questions idiotes, c’est pour « se faire remarquer ». Ah bon. Parfois, l’élève lui-même affirme naïvement : « ben nan, c’est parce que j’comprends pas, m’man. » « Tais-toi chouchou, tais-toi ». Je ne veux rien entendre. Un jour, j’ai même eu : « Il était le meilleur de sa classe l’an dernier, à Saint-Machin. » Sachant que Saint-Machin est une école d’enseignement spécial, que dire à  la maman admirative de son chérubin ?

 

Puis vous avez le parent à moitié bourré (oui, souvent papa) qui vous fait réaliser tout à coup que la progéniture est finalement méritante de n’avoir que de petites difficultés scolaires. Son air gêné vous tord le cœur. Au suivant.

 

Les parents sévères. Si sévères, au fond, que vous prenez le petit en pitié. Votre rude discours fond comme neige au soleil devant leur réaction effarante remplie de menaces abominables n’envisageant que privation d’amis et internat. Il est évident, pour ces parents, que l’éloignement de leur échec vivant va solutionner toutes les inquiétudes.

 

reunion.jpg

Le parent « tu as une passion pour l’ébénisterie, mais je veux que tu deviennes informaticien ». Parce que les études professionnelles, c’est de la merde. Menuisier, ébéniste, mécano, ce ne sont pas des métiers d’avenir, ma petite dame. Il adoooooooore les ordinateurs. Il deviendra informaticien. Lorsque vous faites remarquer au papa que TOUS les gosses de sa classe passent leurs soirées sur un pc et que ça risque de faire un paquet d’informaticiens, qu’aimer msn ne signifie pas être pro de l’ordinateur et qu’avoir un 4/20 en math ne laisse pas présager un grand avenir dans la programmation, le père vous regarde comme une empêcheuse de tourner en rond, une romantico-neuneuh et une incapable.

 

Le parent « c’est votre faute ». Ben tiens. Il n’a pas rendu deux travaux sur trois mais j’aurais dû lui mettre la moitié.

 

Le parent « je vais vous raconter ma vie à moi. On va me faire une petite psychanalyse, parce que mon gosse, c’est moi. » Et quand j’étais petit, j’étais bien plus courageux que lui. Et j’étais brillant, moi, mais mes parents n’ont pas voulu que je fasse des études.  Alors je suis caissier(ère), mais c’est pas ma faute, nan nan. (mais j’ai vachement honte de ce que je suis et je veux que le petit me rachète un avenir). Ceux-là, je les déteste. Ils te foutent une pression inconsciente sur leur enfant que rien ne pourra jamais effacer. Parce que souvent, s’ils sont là, c’est parce qu’il a un échec. Il est souvent mal parti et maman/papa –qui-n’a-pas-pu-faire-d’études-mais-qui-était-brillant ne l’aidera pas. Parce que quand il veut se mêler de corriger le devoir, il fait encore plus de fautes.

 

Les parents « je viens vous entendre me dire que le petit est parfait ». Il y a une file de trente personnes, bébé a 19/20, mais ils viennent quand même.  Une fois, on peut comprendre. Mais eux, ils viendront à chaque réunion. Et je n’aurai toujours rien à leur dire.

 

Et puis il reste les pires : ceux qui ne viennent pas du tout. Parce qu’ils s’en tamponnent.

Publié dans Ma vie de prof

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
T
J'en sors, d'une réunion parent/prof, hier soir, avec une classe de CAP "borderline" dont la moitié des élèves enchaînent, avec fierté, les exclusions ...Les parents des enfants "normaux", sont<br /> effarés par l'autre moitié de la classe dont l'activité principale est de foutre le "bronx".
Répondre
C
<br /> Bonjour,<br /> je suis une ex "bébé à 19/20", et mes parents allaient à toutes les réunions parents-profs tout simplement pour savoir ce qui se passait en classe, comment je me comportais, etc, parce qu'il ne<br /> fallait pas compter sur moi pour le leur raconter. Certes quand on est prof on s'en passerait bien, mais s'ils ne l'avaient pas fait... ils auraient fait partie de la catégorie des démissionnaires.<br /> Je suis à peu près certaine que j'aurais décroché très tôt s'ils n'avaient pas été sur mon dos d'ailleurs. Savoir que les parents vont aller voir le prof, mine de rien, ce n'est pas sans effet...<br /> 19/20, c'est la pire note à avoir. On croit que tout va bien. Mon oeil.<br /> <br /> <br />
Répondre
E
<br /> <br /> C'est pour cela que j'ai ajouté en finale : "et les pires, ceux qui ne viennent pas".<br /> <br /> <br /> Je suis bien consciente (et mes collègues aussi) que les parents des bons élèves font simplement leur travail en venant. Ma propre mère venait également. Il faut cependant reconnaître qu'il y en<br /> a pas mal qui viennent parce qu'ils craignent qu'on les juge s'ils ne viennent pas. Sans compter ceux qui viennent vraiment pour nous expliquer à quel point le petit est super (on le sait,<br /> merci). Mais il est normal de venir au moins à une réunion ou deux, c'est vrai. Ceci dit, j'ai 250 élèves et la réunion dure trois heures...<br /> <br /> <br /> <br />